La Haute Autorité de Santé (HAS) a dévoilé aujourd’hui les prémices de la stratégie vaccinale contre l’épidémie de Covid-19. Le public prioritaire a été défini ainsi que les étapes clés de la distribution.
Quel est le but de la stratégie vaccinale contre la Covid-19 ? Offrir la meilleure couverture vaccinale en fonction des doses reçues petit à petit, réduire la mortalité attribuable à la Covid-19 et maintenir l’activité du pays. Pour remplir ces objectifs, la HAS livrent ses recommandations.
Qui sera vacciné en premier contre la Covid-19 ?
La priorisation de la population a été révélée aujourd’hui par la HAS. Elle recommande de procéder à la vaccination en 5 phases. Les premières injections de vaccins devraient avoir lieu fin décembre – début janvier.
Les personnes âgées résidant en EHPAD ou en logement collectif seront alors les premiers à se faire vacciner. Également inclus dans la phase 1 de la vaccination, le personnel de ces établissements de plus de 65 ans ou présentant des comorbidités comme une insuffisance respiratoire ou le diabète, recevra le vaccin en priorité. Les 650 000 personnes âgées vivant dans les établissements spécialisés s’avèrent les plus à risque de contracter la maladie et d’en décéder. Près d’un tiers des décès imputables à la Covid-19 concerne la population des EHPAD depuis le début de la crise.
La phase 2 sera elle aussi très limitée du fait de l’acheminement des doses qui se fera petit à petit. Elle concerne les personnes de 65 à 75 ans et plus. Parmi cette tranche d’âge, se feront d’abord vacciner les plus âgés et les plus de 75 ans avec une ou plusieurs comorbidités. Ensuite, viendra le tour de 65 à 74 ans, prioritairement ceux présentant une comorbidité. Enfin, la HAS préconise la vaccination des “professionnels des secteurs de la santé et du médico-social âgés de 50 ans et plus et/ou présentant une ou plusieurs comorbidité(s)”.
Le public prioritaire s’élargit véritablement en phase 3. Celle-ci inclura notamment les professionnels jugés essentiels à l’activité du pays, par exemple tous les médecins, les professeurs, les gendarmes. Plus globalement sur la population, les plus de 50 ans et les moins de 50 avec une ou des comorbidités se vaccineront durant la troisième phase.
La quatrième phase se consacrera à la vaccination toutes les personnes n’ayant pas encore reçu les deux injections nécessaires et qui vivent ou travaillent dans des conditions ou lieux plus propices à la contamination. Ce sera le cas des sans-abris, des détenus, des commerçants, de moins de 50 ans et n’ayant pas de comorbidités. La cinquième phase ouvrira l’accès aux vaccins à toute la population de plus de 18 ans. Mais pour le moment aucune date n’a été fixée pour chaque phase. Il n’y a pas encore de calendrier vaccinal défini.
Quels sont les grands défis de la stratégie vaccinale ?
La stratégie de vaccination reste à approfondir en fonction du suivi vaccinal, de la logistique et de la communication.
Dans son communiqué, la HAS précise qu’il faut prévoir un “suivi de la vaccination permettant la collecte de données en vie réelle”. Cette étape est nécessaire pour définir le temps de protection du vaccin, les effets secondaires, les effets sur le long terme et sur les sujets présentant des comorbidités. Ce suivi permettra d’ajuster l’offre vaccinale de manière plus optimale, pour répondre à la demande de protection suffisante pour atteindre l’immunité collective. Pour cela, la HAS s’appuiera sur trois données-clés pour rendre de nouvelles recommandations : “ l’immunogénicité et l’efficacité des vaccins dans les différents groupes d’âge et groupes à risque ; la sécurité des vaccins dans les différents groupes d’âge et groupes à risque et leur durée de protection ; l’effet des vaccins sur l’acquisition de l’infection et la transmission et le risque de formes graves ou de décès.”
Le deuxième défi de la vaccination porte sur la logistique même de distribution des vaccins. Les étapes de vaccination prennent en compte le nombre de doses alloué à la France et le fait qu’elle ne recevra pas tous les vaccins commandés en même temps. Sur près de 1,4 milliard de vaccins commandés par l’Union européenne, la France en recevra 15%, soit environ 210 millions. Entre le temps pour produire ces vaccins et celui pour les acheminer vers les lieux de vaccination – les EHPAD, les généralistes, les hôpitaux – il est clair que les vaccins seront distribués au fur et à mesure de leur disponibilité. La stratégie vaccinale s’étendra donc sur de long mois.
D’autant plus que le premier vaccin disponible devrait être celui de BionTech-Pfizer. Or, ce nouveau vaccin qui utilise l’ARN, une partie du patrimoine génétique, doit être stocké à une température de -70°C. En France, seuls 130 lieux pourraient d’ores et déjà, ou dans un délais très court, conserver les vaccins dans des conditions optimales. Mais le transport jusqu’à ces lieux n’est lui pas encore garanti à 100%. Pour donner une idée de l’ampleur de la tâche logistique, d’ici janvier le gouvernement espère 1,5 millions de Français présentant des comorbidités sur les 30 millions de Français. Une goutte d’eau dans un océan. Qui plus est, tous les Français ne semblent pas prêts à recevoir le vaccin.
En effet, selon un sondage Ifop-JDD sur les Français et le Covid-19 publié le 28 novembre, plus d’un Français sur deux, 59% précisément, ne souhaitent pas se faire vacciner. Un chiffre alarmant quand l’Institut Pasteur estime qu’il faut un minimum de 60% de personnes immunisées pour atteindre l’immunité collective. La communication est et sera ces prochains mois le troisième grand cheval de bataille de la stratégie vaccinale. À ce sujet, la HAS « insiste sur la nécessité d’une information claire et accessible des publics à toutes les phases de mise à disposition des vaccins”.
La communication et la clarté seront primordiales pour convaincre une majorité de la population. Pour participer à cet effort et surtout éviter les méfiances, la HAS rappelle que la distribution des vaccins reste soumise à la stricte condition d’études établissant “la preuve que les vaccins ont une efficacité possible sur la transmission du virus et que la disponibilité des vaccins (est) suffisante.”